Expédition au Pantanal (Brésil)
Le Pantanal est l’une des zones humides intérieures les plus fabuleuses de la planète pour sa biodiversité animale et végétale. Cette région, en grande partie dans l’état du Mato Grosso (mais aussi le Mato Grosso do Sul, et un peu en Bolivie et au Paraguay), couvre une superficie de 200 000 km² dont 170 000 recouverts par les eaux !
Entre septembre et novembre, débute la saison des pluies qui va peu à peu inonder la région, à travers les nombreuses rivières dont la plus importante est la rivière Cuiabá. Ces inondations sont rendues possibles par la faible déclivité de cette plaine immense. Elles durent environ 6 mois. Il est difficile de circuler dans cette région où alternent donc marais, zones prairiales (de type pampa) et forêts.
A partir de Cuiabá, la capitale du Mato Grosso, une route célèbre descend plein sud : c’est la Transpantaneira, asphaltée seulement à son début et qui se transforme ensuite en piste (dont on imagine la « praticabilité » en saison des pluies !). Longue de 145 km et accompagnée dans son cheminement de 122 ponts en bois, souvent très étroits, elle se termine à Porto Jofre, en bordure de la rivière Cuiabá.
Ensuite, c’est… la jungle !
En route, on croise d’immenses fazendas ‐ ces grandes propriétés terriennes – qui couvrent jusqu’à 20 000 ha. On y trouve souvent de grands troupeaux de bovins (vaches, zébus), et assez fréquemment des chevaux (rarement des moutons).
Renard des savanes, agouti d'Azara, nandou d'Amérique et même tatou à neuf bandes trainent régulièrement autour des fazendas.
La flore est particulièrement riche, avec des figuiers étrangleurs en forêt ou des papyrus en zone marécageuse.
La faune est considérée comme l’une des plus riches au monde. Les oiseaux sont partout et en général vraiment peu farouches (surtout autour des écolodges). Pour des Européens, c’est toujours très étonnant de pouvoir les approcher d’aussi près… Les mammifères sont bien présents, et souvent nocturnes.
Le capybara est en fait une sorte d'énorme... cochon d'Inde. Qui adore barboter et n'est pas très farouche. Quand on l'approche d'assez près, on peut entendre ses petits gloussements graves.
Évidemment les stars comme le jaguar ou le tapir restent des rencontres extrêmement fortes. On ne peut passer sous silence non plus les concerts nocturnes des grenouilles avec une mention toute spéciale pour la « grenouille formule 1 », dont le cri évoque un démarrage d'automobile de compétition...
Protégé, le jaguar n'a pas peur de l'homme... c'est nous qui avons peur de lui ! Nous l'observons d'une barque, au milieu de la rivière. Il se repose caché la plupart du temps, mais quand on a la chance de le trouver (après des heures ou des jours d'attente, en fonction de la chance), c'est un animal incroyable de beauté.
Que serait le Pantanal sans ses caïmans ? Statiques comme des pierres, la gueule ouverte, ils sont omniprésents, jusqu’en milieu sec. Un tout jeune caïman, minuscule mais déjà très belliqueux, est même venu nous rendre visite dans une salle de réunion d’un écolodge (compagnon du log vespéral).
Tout petit mais déjà très teigneux... Pas trop envie de lui faire des guili-guilis, on l'a quand même expulsé de là, ce qui lui a beaucoup déplu.
Quant aux piranhas, ils sont restés sous l’eau. Même si les plus audacieux d’entre nous les ont mangés… en soupe. En effet, ils sont très communs, et l’un des poissons de table régulier.
Deux compagnons d’aventures, un rapaçologue et un lynxomaniaque égarés dans la jungle, revenant ici d’une rivière pleine de piranhas pour tenter de trouver (en vain) le héron agami.
La faune invertébré est aussi incroyable : énormes cigales, fourmis tueuses, petites mais bourrées d’histamine, superbes papillons dont des morphos sans cesse en mouvement, tiques aux aguets, moustiques pas pires qu’ailleurs (mais beaucoup plus nombreux !), etc.
La nature est partout, elle est une, primaire, incroyablement belle. Pas étonnant avec ça que le Pantanal soit inscrit au patrimoine de l’humanité.
En revanche, il fait très chaud à cette époque et, hormis à São Paulo et après le passage d’une pluie, la température diurne culminait quotidiennement à 40° (et un peu plus). Le tout dans une atmosphère humide qui fait transpirer comme pas possible. D’ailleurs, selon notre guide, cette fin de saison des pluies a été particulièrement chaude en 2015 (réchauffement climatique oblige). Mais tout ceci semblait oublié lorsqu’il s’agissait d’observer.
La plupart des prospections se sont faites à pied, aux heures les moins chaudes, mais aussi en bateau (Porto Jofre, Santa Tereza), enfin en camion (énorme, poussif et pas 4x4, mais sympathique), notamment le soir pour des sorties au phare. A Araras, quelques-uns d’entre nous sont aussi partis prospecter à cheval, découvrant des paysages et des sensations inaccessibles autrement.
Bonus : le cri d'oiseau le plus énervant du monde, selon nous, c'est celui de la "poule" sauvage locale, l'ortalide du Chaco, qui commence ses terribles vocalises très tôt le matin ! En prime, cette castafiore chante en duo...
Ecoutez ici !
Merci à Jao, notre guide naturaliste brésilien, inlassable chercheur de jaguars, et Dorothée, qui a assuré la logistique ! Merci aussi à toute la courageuse et sympathique équipe ainsi qu'à Olivier Pollet !
Reportage réalisé lors d'un voyage LPO/Escursia (voyages scientifiques) au cœur du Pantanal, accompagné par Philippe J. Dubois. Photos Elise Rousseau.