Expédition dans le désert de Gobi, épisode 17
Carnet de voyage d’Élise Mazaalai karshan emegtei
Myangaa change son pneu, puis nous repartons.
Le soir, on trouve un petit coin à l’abri du vent, dans la montagne, pour monter le camp. On y déloge un troupeau de chameaux domestiques, vachement pas contents de s’être fait virer de leur petit coin par une bande d’humains. Si on ne peut plus être tranquilles dans le désert ! J’espère qu’ils ne vont pas revenir la nuit foutre leur zone.
Pierre et Philippe s’installent dans le camion de Myangaa pour faire le log, quand celui-ci décide de finir de réparer son pneu.
Mais il n’ose pas les faire sortir, et eux, concentrés, ne se rendent compte de rien, jusqu’à ce que le camion se mette à fortement pencher. Ils se retrouvent coincés là-dedans, en biais. Myangaa, furieux, les foudroie du regard. Il est très territorial avec son camion ! Au fond, il ne supporte pas qu’on y touche. Mais comme c’est un lutteur mongol, on fait profil bas…
Terbish, dans ce genre d’expéditions, a toujours un de ses deux chauffeurs qui est lutteur. Ça doit le rassurer, genre garde du corps, pour partir à l’aventure dans la steppe (et pour pousser les camions enlisés).
Ce soir, il nous explique qu’en fin de séjour nous allons nous rendre à un lac où les moustiques sont abominables, que les tiques à côté c’est que dalle.
Son air révulsé n’est pas rassurant !
Dixième jour. Lundi 27 juin.
Après une nuit fraîche, Philippe a réussi à négocier avec les Mongols un litre d’eau chaude dans une bassine pour se raser. Il me fait profiter de son trésor. 10 jours que je n’avais plus senti la sensation de l’eau tiède sur le visage ! Quel bonheur !
Terbish ce matin est d’humeur badine, il plaisante.
Le traquet du désert chante une mélodie qui raisonne dans les montagnes désertiques.
Se méfier définitivement des oasis
On reprend la route. On sort petit à petit du Gobi A. Un village se dessine au loin. En pleine steppe, nous trouvons une peupleraie. On s’arrête y chercher le moineau des saxaouls.
Par terre, ça grouille de tiques géantes à pattes jaunes. Je les photographie : mauvaise idée ! En 10 secondes, j’en ai 5 dans les chaussures et 1 dans le cou. C’est un nid ! Ça grouille ! Il y en a des centaines !
R. a une encore plus mauvaise idée : photographier un petit argus qui volète à cet endroit. Résultat, les tiques l’escaladent. On lui enlève plus de 50 tiques qui lui grouillent sur le corps (on a compté !!).
Pris d’hystérie, on se met tous à moitié à poil derrière les camions et on s’épouille les uns les autres.
Galaa, qui prudent est resté à l’abri dans son camion, se marre et me montre la roue de son véhicule : des tiques sont en train de l’escalader !!! Horreur ! Je fuis, atterrée, ce qui le fait rigoler encore plus.
En 2012, nous n’avions pas eu de tiques en Mongolie. Mais d’une part, nous sommes dans le désert de Gobi, dont la réputation d’hostilité n’est pas usurpée, et d’autre part, Terbish nous dit que c’est sans doute ici une « année à tiques ».
Nous fuyons ce lieu maudit mais au bout de quelques centaines de mètres, on se rend compte que le second camion ne suit pas. On y retourne. Galaa n’a plus d’essence ! Il aurait mieux fait de surveiller sa jauge au lieu de se poiler ! On le ravitaille et on repart, en chassant les tiques qui ont grimpé dans le camion…
Ganbold
Au village, nous allons rendre visite à Ganbold Douchindorj, le directeur de la Great Gobi Biosphère reserve, c’est-à-dire la réserve du Gobi A. C’est le chef de Nyambayar et un ancien élève de Terbish, qui était son directeur de thèse. Il dit que nous avons eu une chance incroyable de voir l’ours, que certains de ses gars qui travaillent dessus mettent plus de 10 ans avant d’y parvenir. Ganbold nous explique qu’il y a actuellement environ 40 ours, et 17 naissances l’année dernière, ce qui est excellent. Et il estime à 30-40 le nombre de panthères des neiges dans le Gobi A.
La discussion terminée, il missionne un de ses rangers pour nous emmener voir les chameaux sauvages du programme de conservation.
Nous disons au revoir à Nyambayar, notre guide au plus profond du Gobi A, qui nous quitte ici.
Programme d’élevage de chameaux sauvages
2 jeunes chameaux sauvages, nés en captivité et destinés à être relâchés dans la nature plus tard, se trouvent dans un troupeau de jeunes chameaux domestiques d’un à deux ans.
Même s’ils ont un licol, leur comportement reste bien plus méfiant que les autres. Les Mongols en sont à plusieurs relâchés de ce type, et ça se passe bien.
Le troupeau est en liberté, mais des gardes (à cheval et en moto) le surveillent.
Les Mongols nous demandent de tenir les chameaux sauvages. Vue la mal-amabilité des bestioles, peu de risques d’imprégnation… Ils sont farouches.
Myangaa caresse un petit chameau domestique, ravi pour sa part de se faire gratter le crâne. Un dur au cœur tendre, ce Myangaa ! Je vais caresser la bestiole à mon tour, qui en pousse des blatèrements d’extase.
Un peu avant, pendant que les gars regardaient des bergeronnettes printanières leucocephala, je trouve un moineau des saxaouls dans une bergerie, que j’avais explorée pour voir s’il n’y avait pas de chiroptères ou de reptiles. Certains font leur coche !
En route vers le Gobi B
Nous avons repris notre chemin et roulons depuis un petit moment, quand tout un coup un bruit bizarre s’élève du véhicule. POF ! Une petite explosion et de la fumée s’élève de l’avant du camion !
Suite au prochain épisode...