Le brame du cerf, le soir, dans la montagne

Publié le par lesbiodiversitaires

Le brame du cerf, le soir, dans la montagne

Quand on pense au brame du cerf, on imagine souvent les forêts brumeuses et enchevêtrées du centre de la France. Mais l’écouter en montagne offre des ambiances très différentes.

Devant nous rendre à un conseil d’administration de l’association de sauvegarde du chien Berger d’Auvergne, nous nous sommes dits il y a quelques jours : et pourquoi ne pas aller écouter le brame du cerf dans le Cantal ?
En effet, dans cette région encore préservée, ces grands mammifères sont bien présents, et le brame est toujours un moment intense de la vie de ces animaux d’ordinaire discrets.
Les cerfs élaphes, quand ils sont en rut, brament de mi-septembre à mi-octobre environ, pour draguer les femelles et intimider les autres mâles, et leur brame s’entend à plusieurs kilomètres.

Après nous être renseignés sur les bons endroits pour l’écouter, nous voilà donc partis. Un petit village reculé dans la montagne. Nous devons passer une ferme à notre gauche, une maisonnette à notre droite, puis prendre le chemin caillouteux qui mène à une vieille ruine. La petite voiture de location (nous sommes venus en train), poussive, n’aime pas trop ça, elle, les chemins caillouteux… Nous avançons quand même, puis le chemin est coupé par une barrière à vaches. Nous l’ouvrons puis passons, sous les yeux interloqués de quelques Salers, dont une décoche une ruade de protestation en direction de la voiture.

Vaches Salers.

Vaches Salers.

Mais à nouveau, plus loin, des barrières… les vaches ont pris possession du chemin. Nous décidons donc d’abandonner la petite voiture toute seule sous un arbre.
« Les vaches, elles ne risquent pas de s’y frotter ?, dis-je, soupçonneuse, en pensant à ma plus jeune jument camargue qui adore frotter son gros derrière aux voitures, tirer sur les essuie-glaces avec ses dents et faire mine d’arracher les rétroviseurs avec son nez, quand elle ne se met pas à lécher les vitres de sa langue baveuse.
- Mais non ! », répond Philippe, toujours beaucoup plus optimiste que moi envers les intentions prétendument inoffensives des animaux.

Vaches de race Aubrac

Vaches de race Aubrac

Bref, nous laissons la voiture, fourrons le pique-nique (pain, fromage Cantal et pounti) dans un sac à dos, et continuons à pied le chemin.
C’est une petite vallée, et, comme dirait Robert Redford, au milieu coule une rivière. Une vraie rivière à truite, qui glougloute entre les rochers.
Le brame de plusieurs cerfs raisonne déjà dans les montagnes. Ici, ils sont tranquilles, et commencent à bramer tôt.
Les vaches nous regardent passer. Des Salers au look d’auroch, des Aubracs aux yeux de biches. Le fond de la vallée est un cirque herbeux. En bas, les pâtures des vaches. En haut, la montagne sauvage, et les cerfs. Nous arrivons à une vieille bergerie abandonnée et nous nous installons à l’abri du vent. Un premier cerf est vite repéré au loin, accompagné de quatre biches.

Le brame du cerf, le soir, dans la montagne
Le brame du cerf, le soir, dans la montagneLe brame du cerf, le soir, dans la montagne

Une petite vidéo de la course des nuages... et du brame ce soir-là.

L’avantage d’observer le brame du cerf en montagne, c’est qu’il est assez facile de repérer les animaux, qui se déplacent lentement dans les pentes. Ils ne sont pas dissimulés par les arbres, à l’horizontale, comme en plaine. Nous restons loin d’eux, tranquillement cachés derrière un muret.

Le brame du cerf, le soir, dans la montagne
Le brame du cerf, le soir, dans la montagneLe brame du cerf, le soir, dans la montagne

« Sur la crête, il y a un mâle solitaire qui surveille les autres ! », précise tout à coup un vieux bonhomme qui vient de sortir des buissons et de descendre dans notre direction. « Puis un autre, là-bas, sous l’arbre rond, qui vient de se cacher ! » Nous ne les avions pas encore vus.
« Ah ! ben vous avez le coup d’œil, vous !, dis-je innocemment.
- Hé hé, c’est normal ! Je suis chasseur, répond-il fièrement, en bombant le torse. Ça aide. »
Je réponds par un genre de grommèlement pâteux et dénué de sens, mi-poli mi-outré, tandis que le chasseur, fort satisfait, quitte les lieux.
« Un cerf, un cerf… il a peut-être confondu avec une vache », marmonne ensuite Philippe, d’une mauvaise foi irréelle.

Le brame du cerf, le soir, dans la montagne
Le brame du cerf, le soir, dans la montagne

Il fait froid.

La brume commence à tomber sur le sommet des montagnes.
Sur la bergerie, un artiste anonyme s’est amusé à taguer la faune locale, dont une tête de cerf.
Le brame s’intensifie.

Nous comptons 8 mâles et 5 biches.
D’autres doivent être cachés dans la forêt.
Le vent fait bruisser les feuilles, les vaches font tinter leurs cloches et poussent quelques meuglements, et les cerfs brament tout ce qu’ils peuvent, par vagues.

Pour avoir un aperçu de l'échelle...

Pour avoir un aperçu de l'échelle...

Le crépuscule tombe de plus en plus. Sorti d’on ne sait où, on voit rentrer un photographe, en habit de camouflage, descendant à grandes enjambées la montagne. Il n’a plus assez de lumière pour faire de belles photos. Nous écoutons encore.

Le brame du cerf, le soir, dans la montagne
Le brame du cerf, le soir, dans la montagne

Puis le froid devient plus mordant, la nuit tombe et il est temps de partir, tandis que le ciel se teinte d’une brume rosée et que de petites chauves-souris commencent à tournoyer sous la lune, entre les montagnes noires qui raisonnent de l’appel retentissant des grands cervidés.

Le brame du cerf, le soir, dans la montagneLe brame du cerf, le soir, dans la montagneLe brame du cerf, le soir, dans la montagne
Le brame du cerf, le soir, dans la montagne

Suite du brame...

Le surlendemain, en descendant d'une montage située sur les lieux du brame, rencontre par hasard, nez à nez, avec un cerf plus jeune que ceux observés jusqu'ici...

Le surlendemain, en descendant d'une montage située sur les lieux du brame, rencontre par hasard, nez à nez, avec un cerf plus jeune que ceux observés jusqu'ici...

Publié dans Biodiversité sauvage

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