Vaches et yaks de Mongolie : les bovins de l’extrême

Publié le par lesbiodiversitaires

Un voyage naturaliste en Mongolie courant juin nous a permis de nous informer sur le bétail mongol – particulièrement chevaux et bovins. Aujourd’hui, zoom sur ces bovins qui sont capables d’endurer des conditions environnementales très sévères et d’endurer des écarts de température considérables.
 
En Mongolie, si les vaches fréquentent la steppe, les yaks sont également présents dans les zones de montagnes. Ainsi deux types de bovins se côtoient dans ce pays trois fois grand comme la France.
Ce qui frappe d’emblée, c’est la capacité d’adaptation du bétail à des conditions climatiques extrêmement rudes. En effet, à quelques exceptions près, les animaux vivent 365 jours dehors, sans le moindre apport alimentaire par l’homme. L’hiver, la température descend allègrement à -30°C, tandis que l’été, dans le désert de Gobi, elle monte facilement à 40°C. Soit un écart de 70°C que le bétail supporte. Il y a sans doute peu d’animaux domestiques qui, de par le monde, peuvent vivre avec des écarts de température aussi importants !
 
Vaches mongoles
Le bétail mongol est issu du type dit Tourano-mongol qui regroupe des races que l’on rencontre des bords de la Caspienne au nord-ouest de la Chine et au sud de la Sibérie. Les animaux se caractérisent par un squelette anguleux et des cornes qui poussent à la verticale et sont parfois en croissant. Les races Yakoute (nord Sibérie), Kalmouk (sud Russie et autour de la Caspienne), Kirghize et Kazakhe sont proche de la race Mongole. En Chine, d’autres races appartiennent au même groupe de bétail comme la variété Ujumqin et l’HalhïnGol. De même la race Hazake, du Xinjiang (nord-ouest de la Chine, représente le type transitionnel entre bétail kazakhe et bétail mongol. La race Mongole proprement dite se rencontre en Mongolie, mais aussi dans la province de Mongolie intérieure, en Chine.
 
Le gabarit de la race Mongole est variable et dépend de son environnement : animaux graciles et légers en zone méridionale et désertique (Gobi, etc.), ou mieux conformés et plus grands dans la partie nord et est du pays (steppe moins désertique, alpages, forêts). Les vaches pèsent entre 280 et 400 kg, tandis que les taureaux atteignent 550 à 600 kg. En région désertique, les vaches ne dépassent parfois pas 1,10 m. La race mongole, très rustique est une race plutôt tardive (première gestation à partir de 2 ans). Il faut parfois 7 à 8 ans pour qu’un animal atteigne sa taille adulte. Ce n’est pas une grande laitière et, en race pure, elle donne entre 500 et 600 kg de lait par lactation. Comme le yak, la vache mongole est capable de se nourrir de très peu en hiver, de perdre un poids considérable, puis d’en reprendre très rapidement dès le retour du printemps.
 
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Groupe de vaches de race Mongole (taureau à droite).
Remarquer la variété des robes et la forme des cornes, verticales.
 
La couleur de la robe de la race Mongole est très variable. Généralement, les animaux ont souvent une robe brun rouge, mais d’autres coloris sont rencontrés comme le noir, le froment-jaune, le pie (noir, rouge), de même que l’on rencontre régulièrement des robes bringées, voire même tigrées. La robe ceinturée (belted) est également régulière. Les cornes sont fines et longues, verticales et parfois en croissant.
 
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Vache Mongole à robe tigrée (très bringée).
 
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Vache à robe ceinturée.
 
Les effectifs des bovins sont assez fluctuants à l’image de celle du cheptel mongol. En effet, les hivers très froids peuvent décimés les effectifs. Ce fut le cas de l’hiver 2009/2010 (le fameux dzud, avec des températures atteignant -50°C !) où l’on est passé de 44,02 millions d’animaux, toutes espèces confondues à 32,73 millions, soit une perte de 26% du cheptel !
Les bovins constituent environ 6,6 % de ce dernier, soit, en 2011, 2,4 millions de têtes dont 700 000 yaks. Pour comparaison, il y a en Mongolie (pour la même année) 280 000 chameaux, 2,11 millions de chevaux, 15,67 millions de moutons et 15,93 millions de chèvres.
Les bovins fournissent à eux seuls 40 % du total de viande et 80 % des produits laitiers.
 
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Vaches Mongoles de région semi-désertique.
 
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Vache Mongole de la région d’Oulan-Bator à constitution plus forte et taille supérieure.
 
Même si la race Mongole domine encore dans le pays, elle subit, ici comme ailleurs, les croisements améliorateurs avec d’autres races, principalement européennes. Ces croisements ont commencé en 1949 avec l’importation de Shorthorn. Depuis, d’autres races ont suivi et actuellement l’Angus, la Limousine, la Charolaise et la Simmental sont utilisées comme l’a été également la Holstein ou l’Hereford.
Les croisements fixés au fil du temps entre Mongole et races allochtones ont donné naissance à des races nouvelles avec notamment :
 
● la Mongole à tête blanche, appelée localement TsagaanTolgoit, issue de croisement avec l’Hereford. Elle ressemble à la Kazakhe à tête blanche.
 
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Vache Mongole à tête blanche (TsagaanTolgoit).
 
● la Mongole pie-noir, appelée Char (ou Shar) Tarlan, issue de croisement avec la Frisonne pie-noir et dont on retrouve une race tout à fait semblable en Chine.
 
● la Mongole brun-jaune (ou brune), appelée localement Bor Kalium, qui est le fruit de croisements avec la Brune (des Alpes) et que l’on retrouve en Chine sous l’appellation Brune du Xinjiang.
 
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Taureau mongol brun-jaune (Bor Khalium).
 
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Vaches croisés Mongole x Simmental.
 
Yaks mongols
A côté des vaches, on rencontre également les yaks, si étroitement liés aux hauts plateaux tibétains, mais aussi chinois, mongols, et sur l’ensemble de la chaine de l’Himalaya et jusqu’en Afghanistan et Kazakhstan. Ils sont issus du yak sauvage Bos grunniens, en général de conformation plus importante que les variétés domestiques, et qui ne vit qu’au Tibet où il est actuellement menacé (environ 15 000 animaux). En Mongolie, on les rencontre plutôt dans le nord du pays ou dans le sud, mais en zone montagneuse (Altaï Gobi). Les yaks paissent entre 1 500 et… 4 000m d’altitude (jusqu’à plus de 3 000m en Mongolie). Aucun autre animal domestique n’est capable de se nourrir à des altitudes aussi élevées. En hiver, il gratte la neige (présente jusqu’à 150 jours par an) pour trouver une maigre subsistance. Les femelles pèsent autour de 270-280 kg et les mâles 400 à 500 kg.
 
 
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Yak sauvage (source : Xinhua Photo).
 
L’utilisation du yak est multiple : viande, lait, laine, mais également comme animal de bât. Le nombre de yaks en Mongolie (le plus important pays après la Chine) est en diminution depuis les années 1940.
Comme pour la race bovine Mongole, la couleur de la robe des yaks est variable. Le noir (68,5% du total) et le brun (16,9%) dominent (le noir étant génétiquement dominant). Cependant on rencontre des animaux au pelage pie (souvent avec juste la tête blanche), mais aussi avec des robes grises. En Mongolie, la grande majorité des animaux sont acères (c’est-à-dire sans cornes).
 
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Troupeau de yaks dans la vallée de la rivière Tüyn (monts Khangaï).
 
Comme pour les vaches, il existe plusieurs « races » (ou variétés ?) de yaks en Mongolie. D’une part le Yak Khangaï (ou Hangaï) et d’autre part le Yak Altaï.
Le Khangaï – du nom de la chaine montagneuse du centre du pays – se rencontre surtout dans le centre et le nord du pays. C’est un animal robuste, de bonne taille et utilisé principalement pour la viande, le lait et le transport. La couleur de la robe est variable, mais ce yak se distingue par le fait que 90 % des animaux sont acères.
 
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Yaks Khangaï. Noter la conformation plus forte que chez le yak Altaï et l’absence de cornes.
 
L’Altaï vient, comme son nom l’indique de la chaine montagneuse qui court au sud du pays. Il est plus adapté que son cousin le Khangaï aux conditions climatiques extrêmes et il est typiquement inféodé à l’étage alpin. Chez cette « race », les robes noire ou pie-noir dominent. La majorité des animaux possèdent des cornes bien développées. Leur pelage est dense, avec de longs poils. Il est utilisé pour le lait et la viande, avec une prépondérance pour cette dernière, grâce à l’amélioration des animaux.
 
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Yaks Altaï à silhouette moins massive que la « race » précédente. Noter la présence de cornes,
qui n’est cependant pas systématique (photo : J.-M. Thibault).
 
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Yak Altaï et son veau (photo : Yvan Tariel).
 
Une femelle de yak donne en moyenne 560 à 740 kg de lait par lactation. Les produits laitiers du yak sont recherchés. Notamment le lait fermenté, qui donne soit un yaourt (le tarag), soit sous forme d’ « alcool de lait », appelé arkhi, qui n’est cependant pas aussi prisé que celui élaboré à partir du lait de jument (aïrag). La viande de yak possède moins de gras que celle du bœuf. Elle est d’un rouge profond, du fait de l’importante de l’hémoglobine et de la myoglobine dans les tissus. Les Mongols ne considèrent pas qu’il y ait une réelle différence de goût entre la viande bœuf et celle de yak. A l’heure actuelle, la viande de yak est plutôt consommée sur place car les circuits de distribution dans les régions reculées où il vit ne sont guère développés.
 
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Yak Khangaï utilisé pour la traction.
  
Comme pour la race bovine Mongole, les yaks sont croisés avec des vaches justement, pour améliorer les performances de l’animal. Ces hybrides sont appelés hainag en Mongolie (ce sont les fameux dzo au Tibet). L’effet hétérosis permet d’augmenter la taille, la production de lait (816 kg de lait en moyenne par lactation) et de viande, la capacité au travail, de même que la longévité. Cependant les croisements de seconde génération sont moins performants du fait de la perte de l’effet hétérosis. Parmi les races bovines choisies pour ces croisements, citons la Simmental, l’Alatau, l’Hereford et aussi, localement, la Mongole.
 
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Hainag (croisement yak x vache).
 
 
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Traite de vaches mongoles (photo : Matthieu Vaslin).
 
Bibliographie sommaire
  •  Cheng P. (1986). Livestock Breeds of China. Animal Production and Health. Vol. 46. FAO, Rome. 217p.  
  • Felius M. (1995).  Cattle Breeds : an encyclopedia. Misset, Doetinchem, 800p.  
  • Wiener G., Jianlin H. et Ruijun L. P. (2003). The yak. FAO, Bangkok.
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P
Je MEUH suis régalée avec cet article.<br /> MEUHrci.<br /> AmicaleMEUH.
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