Des révolutions pour UNE révolution

Publié le par lesbiodiversitaires

Les événements actuels dans les pays du Maghreb comme dans ceux du Moyen-Orient doivent nous porter à l’optimisme. S’il est clair, aujourd’hui, que personne n’a idée de ce que sera la future gouvernance dans ces pays en ébullition, chacun peut se réjouir en constatant que les régimes les plus autoritaires, les plus installés dans une autocratie ou une dictature, finissent tous, un jour, par tomber. Et tomber sous l’assaut de la rue aux mains nues, portée par un ras-le-bol tellement fort, qu’il est incontrôlé (et incontrôlable).

 

Mais il n’y a pas de révolution linéaire. Il n’y a pas de révolution sans versement de sang. Il n’y a pas de révolution sans douleur. Toute révolution est un accouchement. Et comme l’accouchement, la révolution donne la vie. Une autre vie où l’on change complètement de logiciel. Et pour rester dans le vocabulaire informatique, la révolution va plus loin : elle reformate le disque dur.

 

C’est bien ce qui nous manque à nous, dans le monde occidental, c’est la capacité de se révolter. S’indigner, oui, on sait faire. Mais se révolter, on ne sait plus guère. Pourtant le monde consumériste dans lequel nous vivons, dirigé par cette oligarchie à bout de souffle - si bien décrite et démontée par Hervé Kempf dans son dernier livre (L’oligarchie ça suffit, vive la démocratie, Le Seuil, 2011) -, aurait bien besoin lui aussi de reformater son disque dur. Nous ne pouvons plus continuer à vivre sur la terre en faisant fi des manifestations de son épuisement et de son capacité à produire des ressources à l’infini qu’elle nous donne chaque jour. Nous ne pouvons pas plus laisser un petit nombre piller notre héritage commun. Pas plus que nous ne pouvons laisser à ce même clan d’oligarques le soin de nous diriger, par-dessus la tête des dirigeants politiques devenus muets et manchots. Et continuer à croire que le jetable est bien mieux pour notre confort que le durable. Et afficher sur les murs que les grandes entreprises se battent pour une terre meilleure, une vie plus verte, une économie plus durable… Les balivernes du green washing ne dupent que ceux qui ne veulent rien voir d’autre que leur confort immédiat, matériel et intellectuel (enfin, intellectuel, c’est assez vite dit ; c’est plutôt du washing de cerveau télévisuel…).

 

Mais l’alternative à tout ça, c’est quoi ? L’altermondialisme ? Les écologistes ? Les tiers-mondistes ? Les mouvements de consommateurs ? C’est peut-être tout ça, en effet, et rien de ça non plus… Comment se fait-il, par exemple, que les discours des uns et des autres précités n’aient qu’aussi peu d’échos auprès des populations occidentales ? Sans doute la voix libérale du monde marchand est-elle plus forte que la petite musique de ceux qui voudraient vivre autrement. Autrement que de façon marginale. Il serait illusoire de penser aujourd’hui que ceux qui veulent changer de mode de vie et de consommation va grossir de façon exponentielle et que bientôt ils pourront faire entendre leurs arguments pour que l’on cesse de vivre les yeux fermés sur notre avenir. Non, ce n’est pas la bonne hypothèse, car cela fait désormais trop de temps (trois décennies) que ces voix se perdent dans le désert.

 

Il serait sans doute nécessaire qu’une révolution verte éclate dans le monde occidental.

 

Pas la révolution « verte » de Kadhafi, évidemment ! Celle-là, on l’oublie ! Une révolution menée par les classes moyennes qui, confrontées au chômage, à l’impossibilité de consommer davantage (trop endettées), à de pathologies liées à cette consommation (qu’avons-nous dans notre assiette ? Et que respirons-nous ?), descendront dans la rue pour crier leur colère contre ceux qui, dans leurs bureaux panoramiques auront passé leur temps à nous faire croire aux chimères de la consommation intensive, à l’infini des ressources naturelles et l’inintérêt de la biodiversité pour notre propre bien-être. Il y aura un temps où le monde occidental se révoltera. Et voudra revenir à une consommation plus simple, à une sobriété nécessaire pour vivre bien. Mais l’effondrement de notre société telle qu’elle est aujourd’hui est inéluctable. C’est peut-être de la jeunesse que viendra le « reformatage du disque ». Il n’y aura pas de dictature, pas plus que d’ordre écologico-autoritaire ou de communautés babacoolo-verdâtres. De cette révolution doit naître une société qui consomme toujours, mais mieux, qui ne tourne pas le dos au progrès mais qui en fait bon usage, qui échange sur un mode marchand, mais ni à sens unique, ni dans un but uniquement tourné vers le profit immédiat, qui remet enfin chaque acteur de la terre à sa juste place en tenant compte des réalités économiques et environnementales locales. Bref une société qui aura décidé de prendre en main son destin et celui de sa planète de manière sobre, cohérente et durable.

 

Alors il faut sans doute encore des révolutions comme celles d’aujourd’hui pour que vienne LA révolution.

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