Amoco Cadiz : demain soir sur la chaîne National géographic

Publié le par lesbiodiversitaires

Pour ceux qui voudraient se souvenir de l’histoire de la marée noire de l’Amoco Cadiz, Elise en parle, en tant que militante de l'association de protection de la nature Bretagne Vivante, dans un documentaire sur ce sujet qui sera diffusé demain soir, vendredi 16 mars, à 20h40, sur la chaîne National Géographic, pour les 40 ans de l’échouage. L’occasion d’un dialogue avec le navigateur Loïck Peyron, et d’un retour sur des lieux d’enfance...

Tournage sur les dunes Saintes-Marguerite, Finistère Nord. Photo : Simon Kessler

Tournage sur les dunes Saintes-Marguerite, Finistère Nord. Photo : Simon Kessler

Le 22 novembre dernier, j’ai passé la journée sur les dunes Sainte-Marguerite, près de l’Aber Benoit. Pour un documentaire pour la chaîne National géographic, parmi tous les témoignages recueillis (ostréiculteurs, scientifiques, etc.), je devais pour ma part témoigner de ce que c’était d’être enfant, en vacances, sur les lieux touchés par le naufrage du pétrolier l’Amoco Cadiz. Et des conséquences sur les engagements militants à venir. 

Pour moi, les souvenirs sont lointains et pourtant marquants, je n’avais même pas un an lorsque le navire s’est échoué, mais j'en ai entendu parler toute ma jeunesse. L’Aber Benoit fut un des lieux largement touchés par la pollution. Mes grands-parents y vivaient, à Prat-Ar-Coum.

L’Amoco Cadiz, ce nom résonne au plus profond de ma mémoire. Le souvenir lointain de quelque chose de sale, mais surtout, le souvenir du désarroi des adultes, même des années plus tard. Le souvenir de ma mère, quand je voulais jouer comme tout enfant à faire des pâtés de sable, à creuser dans la vase, qui me disait de faire attention, qu’il y avait sûrement encore du pétrole de l’Amoco Cadiz.

« Mais pourquoi, mais c’est quoi lamococadisse ? », demandai-je, enfant, bien après l'année de l'échouage.

« Oh la la… une catastrophe, un pétrolier qui s’est échoué, qui a tout pollué, une terrible catastrophe. Tu vois ici, avant, le sable, il était tout noir, plein de pétrole ».

Je me rappelle l’émotion dans la voix des adultes, longtemps encore après le naufrage. Peu de Finistériens peuvent prononcer ces mots, l’Amoco Cadiz, sans des résurgences de tristesse, ou de révolte. J’ai grandi en apprenant que les hommes pouvaient considérablement abimer la nature, et qu’après, nous les enfants, il fallait faire attention pour jouer.

Comme beaucoup d’enfants de ma génération, Bretons ou d’origine bretonne, présents toute l’année ou pour les vacances, l’Amoco Cadiz a été le déclencheur d’une prise de conscience, extrêmement jeune, de l’importance de protéger la nature. Nous n’avons pas vécu le naufrage avec des yeux d’adultes, nous étions trop jeunes ou par encore nés, mais nous entendions parler les adultes. Cet événement s’est gravé dans nos subconscients. Et de l’Amoco Cadiz, ici, on en a longtemps parlé.

Avant de croiser, dans le cadre de mon travail à Bretagne Vivante, la route des réalisateurs de ce documentaire qui m’ont demandé de me souvenir de cette émotion-là, je ne m’étais jamais vraiment demandée pourquoi j’avais consacré une partie de ma vie à la protection de l’environnement. Ça me semblait juste une évidence : il fallait le faire. Discuter avec eux, retourner marcher sur ces lieux, en me remémorant mes souvenirs d’enfant, a aussi été une analyse de ma conviction écologique !

Car il y a eu l’Amoco Cadiz. Et, huit ans plus tard, l’explosion de Tchernobyl, et le visage blême de ma mère, stupéfaite.

« Qu’est-ce qui se passe, maman ?

Il y a une grosse centrale nucléaire qui a explosé… en Russie… c’est effroyable… »

C’est comme cela qu’à 9 ans, je suis devenue écolo. Comme beaucoup.

L’Amoco Cadiz comme Tchernobyl sont des événements d’une telle violence qu’ils s’inscrivent désormais dans la mythologie des lieux sur lesquels ils se sont produits. Ils sont gravés profondément dans l’inconscient collectif des populations locales, et ils feront partie de l’imaginaire du futur, pour longtemps.

De telles catastrophes peuvent continuer de se produire, on le sait : Erika, accident nucléaire de Fukushima au Japon, etc. Mais il y a aussi toutes les catastrophes moins visibles mais parfois bien pires encore : disparition des abeilles et de la capacité de pollinisation, surconsommation à l’origine de quasi toutes les dégradations de la planète, réchauffement climatique, etc.

L’homme est assez intelligent pour construire des grands pétroliers, d’énormes centrales nucléaires, et pour aller sur la Lune. Ne pourrions-nous pas, enfin, être désormais assez intelligents pour sauvegarder notre seule et unique toute petite planète ?

Merci à National geo, Loïck Peyron, Josselin Mahot, Fabrice Gardel, Thierry Caillibot, Simon Kessler, et toute l’équipe de tournage pour leur accueil et leur passion à tourner ce film. Documentaire diffusé demain soir vendredi 16 mars à 20h40 !

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